quelque chose est arrivé. ce n'est pas tant que vous vous étiez donné rendez vous, ou promis de vous revoir. en fait, tout était arrivé tellement vite avec clyde que finalement, vous n'aviez convenu de rien. il n'avait pas ton numéro, tu n'avais pas le sien, et vous n'aviez jamais communiqué. tu aurais pu aller à la présidence pour réclamer son numéro mais tu n'aurais pas su comment te justifier. d'autant qu'avec les morts de la fin du mois d'octobre, d'autres choses s'étaient passées dans ta tête et c'était finalement des mois plus tard que tu repensais enfin à recroiser monsieur tanoshi.

c'était en partie à cause du fait que tu avais eu besoin de temps, pour savoir si ce n'était qu'un coup de foudre éphémère. et forcé de constater que, finalement, il te manquait cruellement. votre échange n'avait pas été long et pourtant, les semaines passant, clyde était revenu dans ton esprit pour te hanter ou presque. tu l'avais vu de loin, à plusieurs reprises, te satisfaisant du fait qu'il avait l'air d'aller bien. et lorsque de nouvelles inscriptions s'étaient ouvertes au club de théâtre, tu avais pensé à aller postuler. sans le faire. finalement. tu ne t'en sentais pas le courage, tu voulais juste le voir quelques instants, pas nécessairement venir lui pourrir la vie toutes les semaines.

aussi, tu avais attendu la soirée, après la fin des cours et des clubs pour pousser la porte du théâtre. dieu merci, tu n'étais pas au courant du bain de sang qui s'était fait ici. et tu avais avancé dans l'obscurité, vers la scène et les coulisses qui diffusaient une légère lumière : clyde était probablement en train de ranger. aussi tu t'étais annoncé, un peu maladroitement.

c... monsieur tanoshi ?

tu ne savais pas comment l'appeler, d'autant plus si tu tombais sur un autre étudiant.

tu lui as manqué. c'est ce que clyde te dit, lorsqu'il approche de toi. t'as une impression étrange en entrant dans le théâtre. t'es pas vraiment à ta place, c'est pas ton lieu, pas ton sanctuaire à toi. c'est le sien, et tu es clairement sur son territoire. c'est un peu grisant d'avancer ainsi dans l'inconnu, et pour une fois que tu te sens si vivant, il faut encore que ça soit lorsque tu es près de clyde. finalement ça va probablement devenir une habitude, avec le temps.

tu m'as manqué aussi.

tu murmures tout bas. tu savais pas trop en fait, s'il fallait le tutoyer, ou pas. ou prendre de la distance. mais l'idée même de le blesser en essayant de le protéger un peu de l'amas sombre qui se trouvait en toi t'inquiétais. il était hors de question de lui faire le moindre mal. tant pis si c'était à toi ensuite de réparer les dégâts. tu lui devais bien ça, même si tu n'avais pas vraiment idée de pourquoi. tes bras refermés autour de lui, tu sentais la bague que tu avais gardé si longtemps près de toi peser contre ton corps. comme si tu avais dû regretter, ce que tu n'arrivais simplement pas à faire. tu serrais tendrement clyde contre ton corps, songeur.

je regrette d'avoir attendu si longtemps pour revenir.

même si tu ne savais pas vraiment sur quel pied danser avec clyde, ni même s'il aurait vraiment voulu de toi avant cet instant. tu t'inquiétais probablement trop.